Je fis des études, dites “supérieures”, de philosophie. Alors, ce fut la révolution de 68 : ma classe, bourgeoise, serait renversée par une autre classe, prolétarienne ; je pris mes précautions, devint maoïste, plus en pensée qu’en action – j’eus honte, je ne mens pas, de vouloir devenir auteur de l’écrit, forcément réactionnaire… La honte ne tue point : je me mariai avec R., rencontrée à la fac, mariage éminemment bourgeois, église et mairie, et je publiai aux éminentes éditions Gallimard, fréquentai à Paris les déjeuners de la collection “Le Chemin”, chez Georges Lambrichs, on y mangeait des pâtes avec Butor ou Le Clézio, et Michel Chaillou, Jean-Loup Trassard, Pierre Bougeade, Paul Fournel qui devinrent mes amis. Comme tout le monde à l’époque, R. et moi vécûmes “librement”, en ces printemps d’avant le sida, dans les Landes nous connûmes une “vie communautaire”, sexuelle et gauchiste, c’était le bon temps. Le temps des angoisses : je sombrai dans une crise spasmophile, dépressive et nerveuse ; plus tard, je ferais théorie de la beauté des contradictions.