Cinquième vie (1983-1993)

Déjà je faisais œuvre, sinon encore “grande” ; seul clou, déjà, au centre de ces errances. Je rencontrai F., directrice des Presses de la Renaissance – l’amour s’unit à mon questionnement sur la diffusion du livre, comme le concret embrasse l’abstrait, et j’allais avec elle en banlieue de Paris. J’étais toujours celui qui se soucie du statut des auteurs, comme l’économie embrasse la poétique : secrétaire général – je suis aussi “politique” et “institutionnel” – du Conseil permanent des écrivains, je préfigurai, avec le Ministère de la Culture, la Maison des écrivains, dont, avec l’aide de Robert Deleuse, je devins le premier directeur… Je m’aperçevais que, moi le maoïste, j’avais toujours été “patron” : des éditions Hallier, de cette Maison des écrivains ; plus tard de la Société des Gens de Lettres, puis de La SOFIA. Avec F., et avec Tony Cartano, Georges-Olivier Châteaureynaud, Claude Delarue, Jean-Pierre Enard, Erik Orsenna, Rafael Pividal, Catherine Rihoit, ensuite aussi avec Chantal Chawaf, Annie Cohen, Jean-Luc Moreau, Jean-Didier Wagneur, je créai et animai – toujours patron, bon sang ! je sais commander, pas exécuter – la revue Roman, où se célébra le retour du romanesque, après une ère de soupçon. Et, avec F., l’œuvre grandit, de contes en contes, et surtout grâce à un cycle, qui deviendra la “Grande Œuvre” – et que je théoriserais ; après d’autres exils… J’aimai notre chien Valentin, que j’ai pu, plus tard, trahir, je me souviens de nos longues promenades muettes et fraternelles, et puis, autour de Frédérick Tristan et de Jean-Luc Moreau, avec Patrick Carré, Georges-Olivier Châteaureynaud, Hubert Haddad, Jean Lévi, Marc Petit, ensuite aussi avec Francis Berthelot, Jean-Claude Bologne, Sylvain Jouty – tous ces noms font longue litanie, comme des cloches une à une un matin d’été -, je me liai à la Nouvelle Fiction, où se pratique l’idée que j’avais vaguement évoquée, la création de la réalité par l’imaginaire, et je me souviens de nos longues discussions fraternelles en dînant. Mais, l’exil…